La Science-based Targets initiative (SBTi) de A à Z

La Science-based Targets initiative (SBTi) de A à Z

Quel est concrètement le rôle de la SBTi dans la comptabilité carbone ? Organisme reconnu à l’international, il est devenu une référence en matière de décarbonation. Des milliers d’entreprises ont choisi de suivre sa méthodologie pour se fixer des objectifs de réduction de leurs émissions de GES fondés sur la science. En pratique, comment cela fonctionne-t-il ?

Louis Héron

Louis Héron

Head of Marketing

Mise à jour :
14/8/2024
Publication :
28/11/2023

La Science-based Targets Initiative est un mouvement international lancé à la suite de l’Accord de Paris sur le climat de 2015. Son objectif est de mobiliser les entreprises face à l'urgence climatique, de les accompagner dans leurs projets de décarbonation et de garantir la compatibilité de ces projets avec l’objectif de limitation de l’augmentation de la température mondiale à 1.5C° et l'objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050.

La SBTi s’appuie pour cela sur une méthode scientifique permettant d’assurer que les objectifs fixés par les entreprises soient alignés avec ceux fixés à l’aune de la COP21.

Comment fonctionne concrètement la SBTi ? Est-ce une démarche considérée comme fiable ? Comment une entreprise peut s’engager dans une démarche SBT (Science-based targets) ? Quels sont les bénéfices qu’elle peut en tirer ?

Le Science-Based Targets Initiative (SBTi) : un outil au service de la transition écologique

Le projet SBTi a été lancée en 2015 à l’initiative de quatre organisations internationales :

  • le Pacte mondial des Nations Unies (UNGC)
  • le World Wildlife Fund (WWF)
  • le Carbon Disclosure Project (CDP)
  • le World Resource Institute (WRI)

L'objectif principal de cette initiative est d’accompagner les entreprises dans leurs projets de décarbonation et de s'assurer qu’elles se fixent des objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre (GES) alignés avec les objectifs fixés par l’Accord de Paris et scientifiquement viables.

Pour déterminer si les objectifs de réduction des émissions des entreprises sont alignés avec une trajectoire à 1.5C°, le SBTi se base sur les Sciences based targets.

Ces objectifs doivent être conformes avec ce que la science climatique la plus récente juge nécessaire pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris, à savoir limiter le réchauffement de la planète à un niveau nettement inférieur à 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et poursuivre les efforts pour limiter le réchauffement à 1,5 °C.

Pour cela, la SBTi a mis en place une méthodologie très précise qui tient compte de plusieurs facteurs :

  • un budget carbone établi de manière à respecter l’objectif de limitation du réchauffement à 1.5C°
  • les scénarios d’émissions de GES du GIEC ou de l’AIE (Agence internationale de l’Energie)
  • un mode d’allocation des émissions : contraction des émissions en intensité ou en absolu, ou convergence des émissions en intensité vers un niveau de référence par secteur

Cette méthodologie doit permettre aux entreprises de se fixer des objectifs clairs de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre qui ont une base scientifique et de contribuer pleinement à la réduction des émissions au niveau mondial, en fonction de leur impact respectif.

De fortes synergies avec les organismes internationaux

Le SBTi possède a tissé des liens étroits avec le GHG Protocol et le CDP, deux organismes internationaux largement reconnus en matière de décarbonation des entreprises.

Pour valider ses objectifs SBT, l’emploi de la méthodologie développée par le GHG Protocol est fortement recommandé sinon obligatoire. Nous retrouverons donc parmi ces synergies la prise en compte de l’ensemble des gaz à effet de serre et surtout la méthode de comptabilisation des émissions de GES par scope tels qu’établie par le GHG, notamment en ce qui concerne le scope 3 qui permet de mesurer les niveaux d’émissions tout au long de la chaîne de valeur de l’entreprise.

Les synergies avec la méthodologie valorisée par les questionnaires du CDP sont également flagrantes, et cela se justifie d’autant plus que le Carbon Disclosure Project est membre fondateur de la SBTi. Ainsi, la fixation d'objectifs fondés sur des données scientifiques fait partie intégrante des questionnaires CDP. L’absence d’objectifs SBT peut même peser lourdement sur la note finale et entraîner la perte de la note A + voire A.

Par ailleurs l'Initiative Science Based Targets entretient de nombreux partenariats avec d'autres mouvements internationaux, tels que We Mean Business, Business Ambition for 1.5°C et l'Initiative ACT.

Cette complémentarité entre les différents cadres de reporting internationaux ainsi que leur reconnaissance mutuelle permet de fixer un cadre global aux entreprises pour entamer leurs politiques de décarbonation.

L’objectif Net Zéro de la SBTi

En octobre 2021, le SBTi a révélé son référentiel "Net Zero" pour les entreprises. Ce nouveau référentiel incite les entreprises engagées à atteindre un objectif de réduction à long terme allant jusqu’à la neutralité carbone.

L’objectif “Net Zéro” est construit autour de 4 points clé qui vont plus loin que l’approche SBT initiale :

  1. Fixer des objectifs à court terme : pour respecter l'objectif de 1,5°C les entreprises doivent se fixer des objectifs de réduction de leurs émissions totales (scope 1, 2 et 3) alignés avec l’accord de Paris et sur une temporalité de 5 à 10 ans maximum.
  2. Définir des objectifs long terme : en plus des objectifs à court terme, le référentiel Net Zéro oblige les entreprises engagées à définir des objectifs à long terme qui doivent être compatibles avec les scénarios visant à limiter le réchauffement global à + 1,5°C et doivent être à atteints à l’horizon 2050 (et 2040 pour le secteur énergétique).
  3. Contribuer à court terme par la finance carbone : les entreprises sont encouragées à investir dans des projets de séquestration carbone ou d'évitement carbone en-dehors de leur chaîne de valeur. Ces actions sont basées sur l'achat de crédits carbone, un levier qui reste complémentaire aux actions de réduction des GES. La SBTi met cependant davantage l’accent sur les émissions séquestrées que sur celles évitées, considérant les crédits carbone issus des projets d’évitement comme moins fiables.
  4. Neutralisation : finalement, le dernier stade pour atteindre la neutralité carbone consiste à réduire un maximum les émissions résiduelles puis à les absorber par le biais d'actions de séquestration carbone.

A noter que la SBTi a choisi de faire l’impasse sur la comptabilisation des émissions évitées au sein de la chaîne de valeur de l’entreprise, ce qui n’est pas le cas du référentiel de la Net Zero Initiative poussée par Carbone 4. Cela exclut donc la valorisation de produits et services commercialisés par l’entreprise permettant de réduire les émissions de carbone au niveau global (le vélo par rapport à la voiture par exemple).

Pourquoi se lancer dans une démarche d’Initiative Science based targets ?

La SBTi est un mouvement qui a rapidement été reconnu à l’international, de par sa rigueur, sa fiabilité et la crédibilité des acteurs qui en sont à l’initiative. Plusieurs milliers d’entreprises de toute taille ont rapidement adopté l’approche scientifique qu’il promeut pour définir leur trajectoire carbone.

A ce jour, près de 6 800 entreprises à travers le monde se sont engagées auprès de la SBTi dont plus de 4 000 avec des objectifs ambitieux fondés sur la science et plus de 2 600 avec des engagements sur l’atteinte du Net Zéro à l’horizon 2050.

Cette croissance illustre la popularité grandissante de cette initiative, la prise de conscience des enjeux climatiques par les entreprises et l’impérieuse nécessité qu’ils ont de s’y adapter au plus vite, tant pour leur image de marque que pour leur pérennité à moyen et long terme.

La SBTi est ainsi devenue l’un des standards volontaires incontournables dans le paysage de la comptabilité carbone et de l'engagement climatique des entreprises.

La liste de ses bénéfices pour les entreprises s’avère aussi diverse que variée :

  • Améliorer leur marque employeur et leur image de marque via leur action climatique en affichant des engagements concrets auxquels les consommateurs et les jeunes talents sont de plus en plus sensibles.
  • Renforcer la confiance des investisseurs, qui valorisent de plus en plus la gestion des risques climatiques, depuis la réduction de l’impact environnemental jusqu’à la capacité d’adaptation de l’entreprise au changement climatique tout aussi scrutée par les institutions financières.
  • Réaliser des économies substantielles, notamment en matière d'énergie et améliorer leur efficacité opérationnelle au moyen d’une lecture exhaustive et compréhensible de leur empreinte carbone.
  • Contribuer à une croissance économique durable pour les générations futures en s'engageant dans une trajectoire SBT à +1,5°C et en déployant une stratégie de réduction des émissions de CO2 tangible.
  • Accroître leur résilience face aux réglementations environnementales en constante évolution.
  • Stimuler l'innovation et la compétitivité en devenant un leader en matière d'innovation et de développement durable.

Comprendre les mécanismes derrière la SBTi

S’engager dans une démarche SBT nécessite de s’engager concrètement dans un processus de décarbonation mais également de faire preuve de transparence. Ainsi, chaque année, les entreprises devront reporter sur leur niveau d’avancement vis-à-vis des objectifs qu’elles se sont fixés et les ajuster au besoin afin de s’assurer d’atteindre leurs objectifs à long terme.

Elles se doivent également de respecter quatre critères essentiels énoncés par la SBTi :

  • Couvrir un large périmètre d’émission, y compris le scope 3 :

Au moins 95% des émissions directes et liées à l'énergie, du scope 1 et 2, doivent être prises en compte dans l’objectif SBT de l’entreprise.

Concernant le scope 3 sa comptabilité est obligatoire s’il représente plus de 40 % de l'empreinte carbone de l'entreprise. Dans ce cas, l'objectif de réduction doit couvrir au moins 67 % des émissions du scope 3.

  • Pas de compensation carbone : la compensation carbone n’est autorisée que pour les entreprises souhaitant financer des réductions d'émissions de CO2 supplémentaires au-delà de leurs objectifs de réduction SBT.
  • Les émissions évitées ne sont pas prises en compte par le SBT
  • Les certificats d'énergie renouvelable doivent être utilisés uniquement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du scope 2.

Comment se fixer des objectifs SBT

La première étape à suivre lorsque l’on souhaite se fixer des objectifs SBT est d’établir une année de référence. Le bilan carbone réalisé lors de cette année de référence servira de base pour fixer les objectifs de décarbonation de l’entreprise tout au long de sa démarche SBT.

Afin de pouvoir fixer ses objectifs, l’entreprise doit dans une second temps réaliser un scénario d’émission qu’elle mettra en parallèle avec son “budget carbone”, à savoir la quantité maximale d’émission de GES qu’il lui est possible d’émettre à l’horizon 2050 tout en respectant les objectifs de limitation du réchauffement climatique à 1.5C°.

Enfin, en s’appuyant sur cette analyse, la dernière étape consistera pour l’entreprise à se fixer des objectifs de réduction de ses émissions compatibles avec le maintien du réchauffement climatique à 1.5C°, conformément aux Accords de Paris. Pour s’assurer que ces objectifs soient scientifiquement viables, la SBTi fournit aux entreprises s’engageant dans cette démarche un cadre méthodologique qui l’aidera à identifier les meilleurs leviers d’action lui permettant d’améliorer son bilan carbone.Il conviendra pour l’entreprise de se fixer des objectifs de moyen terme, sur 5 à 10 ans, et des objectifs de long-terme, fixés à l’horizon 2050, accompagnés d’objectifs intermédiaires.

Key criteria for near and long-term science-based targets
Key criteria for near and long-term science-based targets (Source : SBTi Getting Started Guide - Avril 2023)

Ces objectifs peuvent être formalisés sous différentes formes :

  • des objectifs de réduction en valeur absolu
  • des objectifs de réduction en valeur relative ou intensité carbone
  • des objectifs d'engagement des fournisseurs ou des clients (scope 3)
  • des objectifs d’approvisionnement en énergies renouvelables : sur le scope 2, ceux-ci doivent représenter 80% d’énergies renouvelables en 2025 et 100% d’ici à 2030.

Les entreprises peuvent également soumettre des objectifs combinés, c'est-à-dire qui agissent simultanément sur plusieurs scopes. Il s’agira alors de s’assurer que la part représentant les scope 1 et 2 soit alignée avec un scénario de réchauffement climatique à 1.5C° et celle représentant le scope 3 avec un scénario “bien en-dessous de 2C°”. 

Les entreprises devront chaque année réaliser un suivi des résultats obtenus en fonction des objectifs prévus et devront au besoin réévaluer ces objectifs à l’aune de ces résultats ou d’événements exceptionnels survenus pendant la période et susceptibles d’avoir un impact sur les émissions de GES de l’entreprise.

La Science-Based Targets Initiative conçoit par ailleurs des méthodologies de comptabilité et des trajectoires carbone sectorielles incitant les entreprises à établir des objectifs climatiques basés sur la science toujours plus ambitieux et pertinents. Sur les 17 secteurs identifiés, 8 méthodologies sectorielles telles que le ciment, l'énergie, les institutions financières ou encore le SBTi FLAG (Forest, Land and Agriculture), ont déjà été finalisées, les autres étant en cours de développement.

Comment adhérer à la Science-Based Targets Initiative ?

La fixation d'un objectif scientifique de réduction des émissions est un processus long qui peut prendre jusqu'à deux ans et demi. Comprendre ce cheminement et ses lignes directrices est essentiel pour permettre à son entreprise d'obtenir sa validation SBT et de jouer un rôle majeur dans la lutte contre le réchauffement climatique et le développement durable.

Il faut passer par 5 étapes pour obtenir la certification SBT.

Processus d’engagement auprès de la SBTi
Processus d’engagement auprès de la SBTi (Source : SBTi)
  1. S'engager.

La première étape est une formalité administrative : l'entreprise doit soumettre au SBTi une lettre d'engagement déclarant l'intention de son entreprise de fixer un objectif fondé sur des données scientifiques. Différents modèles de lettres d'engagement, en fonction de la taille de votre structure, sont disponibles sur le site de la SBTi.

  1. Elaborer

L'entreprise dispose d'un délai de deux ans pour construire sa feuille de route qui doit être, alignée avec les objectifs de l’Accord de Paris. Pour élaborer ces objectifs scientifiques, l'entreprise doit utiliser les méthodologies mises à disposition par la SBTi et le cas échéant le cadre méthodologique sectoriel la concernant.

  1. Soumettre

L’entreprise présente au SBTi son plan de décarbonation de manière officielle.

  1. Communiquer

L’entreprise est incitée à communiquer amplement sur ses objectifs et à informer ses parties prenantes de ses engagements.

  1. Divulguer

L’entreprise doit suivre ses niveaux d’émissions de GES à l'échelle du groupe et reporter sur les progrès réalisés chaque année pour atteindre ses objectifs SBT.


Traace peut vous accompagner dans la mise en place et le suivi de votre démarche SBT. Pour en savoir plus, vous pouvez nous contacter via ce formulaire.

Sources : 

Sur la même thématique
Parlons de vos enjeux de décarbonation
Demander une démo