C’est un jeu auquel on se prête volontiers. Peut-on prédire ce que 2025 va apporter en matière de lutte contre le réchauffement climatique ? La tâche est ardue, tant le monde semble plongé dans une ère d’instabilité où certitudes et engagements vacillent. Comme le montre l’actualité récente, la France ne fait pas exception. Malheureusement, les signes avant-coureurs ne prêtent guère à l’optimisme. Explorons les tendances à venir et leurs implications.
Les Etats-Unis vont (encore) quitter les Accords de Paris
L’arrivée de Donald Trump au pouvoir réserve peu de surprises quant à l’engagement du premier pollueur historique mondial dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’hypothèse d’un retrait américain des Accords de Paris en 2025 risque donc bien de se concrétiser. Donald Trump n’a cessé de répéter tout au long de sa campagne présidentielle qu’il quitterait ces Accords. Paradoxalement, des géants pétroliers, investissant de plus en plus dans les énergies renouvelables, plaident pour maintenir ces engagements. Cependant, l’inflexibilité de l’ancien président sur ce point réduit considérablement l’espoir d’une réorientation.
Mais quel impact cela aura-t-il sur le monde ? Probablement peu. Démocrates ou républicains, les États-Unis n’ont jamais été des leaders en matière de politiques climatiques ambitieuses. Le reste du monde, bien conscient des limites de leur engagement, poursuit sa transition écologique en s’appuyant sur d’autres moteurs d’innovation et de gouvernance. Ainsi, l’inertie américaine, bien que regrettable, n’est pas de nature à freiner complètement l’élan international.
Green deal européen : en arrière toute
Sans abandonner toutes les mesures adoptées dans le cadre du Green Deal, la nouvelle constitution du Parlement européen semble diriger l’UE vers un nouveau Pacte Vert low cost. La loi sur la déforestation a été la première à en faire les frais en étant considérablement assouplie et en voyant son application repoussée. La directive CSRD est maintenant dans le viseur. Après un premier coup de semonce lancé par le rapport Draghi, ce sont les dirigeants européens puis les députés qui se sont engouffrés dans la brèche. L’objectif des parlementaires ? Créer de nouveaux seuils d’application permettant à des milliers d’entreprises d’échapper aux exigences les plus strictes de ce standard de reporting extra-financier. Sentant probablement le vent tourner, une majorité de pays de l’UE n’a d’ailleurs toujours pas retranscrit cette réglementation dans leur droit national, y compris l’Allemagne, pourtant menée par une coalition comprenant les écologistes et les sociaux-démocrates.
Même la réglementation CS3D sur le devoir de vigilance des entreprises est sur la sellette, certains politiciens appelant à vider de sa substance une directive déjà adoptée a minima. Le parlement européen s’apprête donc à détricoter les principaux piliers de l'European Green Deal au risque de l’affaiblir considérablement et de compromettre l’ambition européenne de devenir un leader mondial de l’industrie verte.
Les GreenTech se concentrent
Le secteur des GreenTech, qui a connu une véritable explosion ces dernières années, devrait entrer en 2025 dans une phase de consolidation. Alors que les start-ups technologiques traditionnelles peinent depuis quelques années à attirer des investissements dans un contexte économique incertain, les entreprises de la GreenTech ont continué de bénéficier de l’attention des investisseurs. Ce succès repose sur un facteur clé : leur capacité à répondre à des réglementations environnementales de plus en plus contraignantes, tout en s’alignant sur les attentes des consommateurs et des entreprises en quête de solutions durables.
Cependant, une nouvelle phase semble apparaître. La tendance amorcée en 2024 vers des fusions et acquisitions devrait ainsi s’intensifier en 2025. Cette concentration pourrait permettre de consolider les forces du secteur en réduisant les acteurs les moins solides et en renforçant les capacités d’innovation des entreprises survivantes. Beaucoup de jeunes entreprises, souvent focalisées sur une vision court-termiste risquent de faire les frais de cette phase de consolidation en peinant à rivaliser avec des acteurs bénéficiant de plusieurs dizaines d’années d’expertise et d’un savoir-faire éprouvé. In fine, les entreprises leaders, dotées de moyens accrus et d’un positionnement stratégique clair, pourront devenir des locomotives pour une transition écologique à plus grande échelle. Cette phase de maturité est propice à l’émergence de nouveaux marchés liés à des technologies de rupture. Ces évolutions placeront les GreenTech au cœur des stratégies économiques et climatiques.
L’influence grandissante de la politique environnementale chinoise
La Chine, premier émetteur mondial d’émissions de gaz à effet de serre, pourrait paradoxalement jouer un rôle positif en Europe. L’arrivée massive de véhicules électriques chinois à bas coût bouleverse déjà le marché européen, ouvrant ce marché aux ménages qui n’avaient pas les moyens de s'équiper jusqu’à présent. Bien que cette concurrence suscite des craintes économiques, elle pourrait donc démocratiser l’accès à la mobilité électrique et donc accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre en Europe ainsi qu’avoir un impact conséquent sur son mix énergétique.
Cependant, cette dynamique n’est pas sans ambiguïtés. La production chinoise, s’appuyant encore massivement sur de l’énergie issue d’usines à charbon, reste fortement carbonée, ce qui risque de déplacer les émissions plutôt que de les réduire. La dépendance accrue de l’Europe à l’égard de la Chine dans ce secteur soulève également des questions stratégiques. Une industrie automobile européenne plus proactive et accessible aurait sans doute permis une transition plus équilibrée et durable. Ce qui s’est déjà passé avec l’industrie des panneaux photovoltaïque semble donc se répéter inexorablement.
Les crédits carbone font leur come-back
Après avoir enchaîné les crises et les scandales, les crédits carbone ont longtemps souffert d’une mauvaise presse. En 2023, le marché s’est ainsi effondré de -61 %. Loin d’abandonner ce type de projets, les pays participant à la dernière COP29 ont pris le pari de relancer ce mécanisme mais en fournissant un cadre beaucoup plus strict, sous l’égide de l’ONU, pour encadrer l’émission et les échanges internationaux de crédits carbone. Cette refonte, visant à restaurer la crédibilité de ce mécanisme, pourrait dynamiser à nouveau le marché.
En parallèle, un nouveau concept émerge : les crédits biodiversité. Dans la foulée du vote de la loi européenne sur la restauration de la nature, plusieurs pays de l’Union commencent à développer des projets d’émission de crédits biodiversité visant à inciter les entreprises à financer des projets de préservation et de restauration des écosystèmes. Ce développement pourrait non seulement renforcer les efforts environnementaux, mais aussi diversifier les outils à disposition pour répondre à l’urgence climatique. Reste à espérer que ces dispositifs tireront les leçons des écueils passés.
L’année 2025 semble se profiler comme une période de contrastes, où reculs et avancées s’entrelaceront. Entre désengagements politiques, transformations industrielles, et innovations réglementaires, l’action climatique reste à la croisée des chemins. Les choix faits aujourd’hui détermineront si l’humanité saura réellement inverser la courbe du réchauffement climatique ou si elle continuera à naviguer à vue face à l’urgence.