Scopes 1, 2, 3 du bilan carbone : comment ça marche ?

Scopes 1, 2, 3 du bilan carbone : comment ça marche ?

Si vous avez commencé à vous intéresser aux différentes méthodes de calcul des émissions de gaz à effet de serre, vous avez forcément entendu parler des fameux scopes d'émissions. Que signifie scope 1,2 ou 3 et que se cache-t-il derrière la catégorisation par scopes ?

Naal Narayanan

Naal Narayanan

Climate Content Manager

Mise à jour :
12/3/2024
Publication :
2/6/2023

Quel est l'origine des scopes 1, 2 et 3 ?

La mesure des émissions de gaz à effet de serre des entreprises est le prérequis au passage à l'action. Or cette mesure et son analyse peuvent s'avérer fastidieuses. Il existe aujourd'hui différentes méthodologies de comptabilité carbone qui font référence et ont valeur de normes ou de standards.

Parmi celle-ci, on pourra citer la méthodologie Bilan Carbone®, la méthodologie BEGES, le standard GRI 305, la méthodologie du GHG Protocol ou encore la norme ISO 14064. Ces différentes méthodologies de comptabilisation des émissions de GES évoluent en permanence et tendent globalement à converger afin de faciliter la réalisation de bilan d'émissions de CO2.

La catégorisation des postes d'émissions en 3 scopes a été proposée initialement par la méthodologie portée par le GHG Protocol.

Créé en 1998 le GHG Protocol ou « Greenhouse Gas Protocol Corporate Accounting and Reporting Standard » a pour ambition de poser un standard international de comptabilité carbone et de fournir les outils, guides et formations associés afin d'accélérer la transition bas carbone des entreprises et des gouvernements.

Le GHG Protocol est le fruit d’une collaboration étroite entre le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD), le World Resources Institute (WRI), plusieurs entreprises, gouvernements et ONG.

Scope 1, 2, 3 : définition

Dans sa méthodologie, le GHG Protocol catégorise les émissions de gaz à effet de serre (GES) anthropiques en 3 scopes :

  • Le scope 1 inclut toutes les émissions directes de gaz à effet de serre de l'entreprise, comme le chauffage des locaux et les émissions des véhicules de l'entreprise.
  • Le scope 2 comprend les émissions indirectes liées à la consommation d'énergie (électricité, vapeur, chaleur, froid, air comprimé, etc.) lors de la production d'un produit ou service.
  • Le scope 3 rassemble toutes les autres émissions indirectes de l'entreprise, telles que les achats de marchandises et de services, l'utilisation des produits vendus, le transport amont et aval de marchandises et de matières premières, etc. Le scope 3 représente généralement la majorité des émissions totales des entreprises. Jusqu'à plus de 98% pour certains clients Traace par exemple.

Initialement la méthodologie du GHG Protocol ne mentionnait que les scopes 1 et 2. Ce n’est qu’en 2011 que les émissions de GES du scope 3 ont été spécifiées, permettant d'élargir l'analyse des sources d'émissions.

Détail des différents postes d'émissions au sein des scopes d'émissions carbone

Une catégorisation en scopes reconnue mondialement

De nombreux cadres internationaux réglementaires et ou non réglementaires se basent sur la catégorisation en scope du GHG Protocol :

  • Le Carbon Disclosure Project (CDP)
  • La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD)
  • La Sciences Based targets Initiative (SBTi)

La norme ISO 14064 publiée en 2006, la méthodologie Bilan Carbone® portée par l'Association Bilan Carbone ou encore la V5 de la méthodologie BEGES proposent des catégorisations des émissions de gaz à effet de serre différentes de celles du GHG Protocol. Cependant elles tendent désormais à s’harmoniser et font généralement le lien entre leurs postes d'émissions et les scopes du GHG Protocol, comme le montre cette infographie comparative des méthodologies :

Tableau comparatif entre les catégories et postes fixés entre le référentiel national, le Bilan Carbone® et le GHG Protocol - Source : ADEME

Les scopes 1,2,3 dans le détail

C'est quoi le scope 1 ? Les émissions directes

Le scope 1 inclut les émissions de gaz à effet de serre liées à la production du produit, telles que la combustion de carburants fossiles, les émissions de CO2 et de méthane. Ces émissions sont appelées émissions directes.

Le GHG Protocol a identifié cinq catégories d’émissions directes :

  • Les sources fixes de combustion
  • Les sources mobiles à moteur thermique
  • Les procédés hors énergie
  • Les émissions directes fugitives
  • Les émissions issues de la biomasse (sols et forêts)

 

C'est quoi le scope 2 ? Les émissions indirectes en rapport avec la consommation d'énergie

Le scope 2 inclut les émissions de gaz à effet de serre résultant de la consommation d'énergie d’une entreprise. En effet, la production d'électricité est plus ou moins émissive en fonction du mix énergétique de son pays d'origine. Les émissions indirectes liées à la consommation énergétique sont enregistrées dans le scope 2.

Le GHG Protocol a identifié deux catégories d’émissions indirectes liées à la consommation d’énergie :

  • Les émissions de GES liées à la consommation d'électricité
  • Les émissions liées à la consommation de vapeur, chaleur ou froid

C'est quoi le scope 3 ? Les autres émissions indirectes

Enfin, le scope 3 regroupe toutes les postes d'émissions de gaz à effet de serre qui ne sont pas directement liées aux activités de l’entreprise. Elles sont générées tout au long de la chaîne de valeur.

Par exemple, les matières premières nécessaires à la fabrication d'un produit sont extraites, transformées et transportées jusqu'à l'usine de production. Chacune de ces étapes émettant des gaz à effet de serre qui sont inclus dans le Scope 3 du bilan GES.

Le GHG Protocol a identifié seize grandes typologies de sources d'émissions indirectes :

  • Émissions de gaz à effet de serre liées à l'énergie non incluse dans les scopes 1 et 2
  • Achats de produit et de service
  • Immobilisation des biens
  • Déchets
  • Transport de marchandise amont
  • Déplacements professionnels
  • Actifs en leasing amont
  • Investissements de l'entreprise
  • Transport des visiteurs et des clients
  • Transport des marchandises aval
  • Utilisation des produits vendus
  • Fin de vie de produit vendu
  • Franchise aval
  • Leasing aval
  • Déplacement domicile travail
  • Autres émissions indirectes.

Les limites de la catégorisation en scopes 1,2,3

La définition des 3 scopes ne permet pas de comptabiliser les émissions ou réduction d'émissions réalisées en-dehors du périmètre d'activité de l'entreprise. Ne sont ainsi pas prises en compte les émissions évitées ou négatives, comme la participation à des projets de contribution carbone.

Différents référentiels ont commencé à prendre en compte ces émissions et proposent des méthodes de comptabilisation. Néanmoins, celles-ci s'appuyant sur des scénarios de référence en qualité d'hypothèses, les différents organismes conseillent de rester prudents quant à leur utilisation.

Des limites auxquelles répond le référentiel NZI

Le projet Net Zero Initiative est une nouvelle méthode de catégorisation des émissions lancée en juin 2018 et porté par le cabinet de conseil spécialisé Carbone 4 en collaboration avec des entreprises et un conseil scientifique de haut niveau. Cette approche de la comptabilité carbone a pour avantage de prendre en compte non seulement les émissions induites (les scopes 1,2, 3), mais également celles évitées et négatives. Cela afin de fournir un référentiel pour une neutralité carbone collective

Les émissions négatives correspondant à la séquestration de carbone et les émissions évitées au financement ou à la vente de services et produits “bas carbone”.

Cette approche permet aux organisations d'obtenir une empreinte carbone de leurs activités et financements plus pertinents et de maximiser leur contribution à la lutte climatique.

Les 10 principes Net Zero Initiative, dont Traace est signataire, structurent cette méthodologie et garantissent une action climatique ambitieuse et efficace. Retrouvez les 10 principes de la NZI ici.

Cette méthodologie incite les organisations à voir au-delà de la méthodologie du GHG Protocol en mesurant non seulement les scopes 1,2,3 mais également leurs actions climatiques. En effet, le principe n°3 qui énonce que pour structurer son action climat, une entreprise doit distinguer trois différents types d’action, non fongibles : la réduction des émissions, l’évitement, la séquestration, repose sur 3 piliers :

  • Pilier A - Réduire ses propres émissions directes et indirectes, soit les émissions du scope 1, 2 et 3.
  • Pilier B - Réduire les émissions des autres :
    - En commercialisant des solutions bas-carbone, comme par exemple la vente et ou la location de vélo.
    - En finançant des projets bas carbone en dehors de sa chaîne de valeur
  • Pilier C - Augmenter les puits de carbone :
    - En développant les absorptions de carbone chez soi et dans sa chaîne de valeur
    - En finançant des projets d'absorption hors de sa chaîne de valeur.

Ainsi, le projet NZI est complémentaire au calcul des émissions des scopes 1,2,3, en comblant une lacune importante, qui est la comptabilité des émissions négatives et évitées.

Peut-on parler d'un scope 4 ?

Le GHG Protocol s'est également intéressé au sujet en définissant un scope 4 qui comptabiliserait les émissions évitées. Le scope 4, tel qu'évoqué par le GHG protocol a une vision plus réduite des émissions évitées que celle de l'ADEME ou de la méthode Bilan Carbone. Il ne prend ainsi pas en compte le financement de projets de séquestration.

Le GHG protocol inclut dans ce scope 4 les produits ou services dont l'utilisation a un impact carbone moindre que l'alternative utilisée dans le scénario de référence. Par exemple, des salariés qui privilégieraient le covoiturage à la voiture individuelle lors de leurs trajets domicile-travail.

Sont également prises en compte dans ce scope 4 les émissions évitées liées au recyclage d'un produit.

Cette approche nécessite donc de réaliser des scénarios de référence les plus fiables possibles permettant de mesurer de manière suffisamment précise les émissions évitées. Elle fait également le pari du développement de nouvelles technologies permettant le développement de pratiques moins carbonées.

Le GHG Protocol reste cependant prudent sur ces analyses et précise que ce type d'évaluation ne doit ni primer sur ou nuire aux efforts déployés pour calculer et réduire les émissions des scope 1, 2 et 3.

L'ADEME, en s'appuyant sur la norme ISO 14064-1, recommande également de publier ces informations à part du bilan de gaz à effet de serre de l'entreprise.

Le scope 3, priorité pour de nombreuses entreprises

Aujourd’hui, seul le bilan des émissions des scopes 1 et 2 est obligatoire dans la méthodologie du GHG Protocol, restreignant la mesure du scope 3 à une simple recommandation. Il s’agit là de la plus importante limite de la méthodologie du GHG Protocol. En effet, selon le CDP, la chaîne de valeur équivaut en moyenne à 92 % de l'empreinte carbone des entreprises. C’est pourquoi, réaliser le bilan carbone de son scope 3 pour le réduire représente aujourd’hui la meilleure action climatique qu’une entreprise peut prendre.

C'est notamment la raison pour laquelle, en France, depuis le 1er Janvier 2023, les entreprises soumises à la Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF) doivent inclure les 3 scopes d'émissions à leur bilan d'émissions de gaz à effet de serre (BEGES).

Chez Traace, nous connaissons très bien les enjeux et limites de l'empreinte carbone du scope 3. Nous avons notamment développé un module dédié au pilotage de l'impact environnemental et de l'engagement des fournisseurs afin de fournir aux entreprises un outil efficace pour s'attaquer à la décarbonation de leurs achats et à la mise en place d'une politique d'achat responsable.

Si vous souhaitez en apprendre plus sur la décarbonation et les limites du scope 3, nous vous invitons à télécharger notre webinar en partenariat avec le cabinet spécialisé Magelan sur "Comment accélérer la décarbonation de sa chaîne de valeur".

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